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Aujourd’hui, nous vous présentons Fanny Laurent, auteure du roman Eldorado (Parution le 21 avril 2022)

 

 

Bonjour Fanny ! Ton roman Eldorado sort le 21 avril, que ressens-tu à l’approche de cet événement ?

Je suis impatiente d’enfin voir le résultat de plusieurs mois de travail et de recherches. J’ai hâte que tous mes amis, mes proches ainsi que les futurs lecteurs le découvrent. C’est une concrétisation, un véritable rêve qui se réalise !

C’est ton premier roman publié par une maison d’édition. As-tu réalisé d’autres ouvrages dans l’ombre ?

J’ai effectivement écrit un autre roman, Ganga, qui sera publié à l’automne par une autre maison d’édition. J’achève également mon troisième roman… Mais pour l’instant, je me consacre exclusivement à la sortie d’Eldorado !

Tu as grandi à Lyon et tu as, par la suite, voyagé au Canada et en Australie. Pouvons-nous dire que ton expérience personnelle et ton vécu ont joué des rôles majeurs dans l’écriture d’Eldorado ?

Quand j’étais petite, j’ai eu la chance d’énormément voyager avec mes parents et mon frère parce que je suis issue d’une famille curieuse et globetrotteuse. À dix-neuf ans, je suis partie en Inde faire une année d’échange universitaire et c’est à partir de cette expérience que j’ai attrapé le “virus du voyage”. J’ai réalisé que c’était simple de voyager seule, et la plupart des gens que je rencontrais sur ma route incarnait la bienveillance et le savoir-vivre. Je n’ai vécu que de bonnes expériences, notamment en étant invitée chez des habitants locaux ou en faisant de l’autostop. Pour moi, le voyage est rapidement devenu un point de repère et un enrichissement personnel. Les rencontres spontanées ont beaucoup à nous apporter !

Le sujet principal de ton roman porte particulièrement sur la transmission entre les générations, notamment les trois personnages principaux. Pourquoi avoir fait ce choix ? 

J’ai réalisé assez tard que ce sujet me passionnait. J’adore les secrets de familles, si bien que de nombreux livres que j’ai lus  jusque-là mentionnent des histoires familiales : La bâtarde d’Istanbul d’Elif Shafak (mon autrice préférée), À la mesure de l’univers de Jon Kalman Stefansson ou Les Steenfort, maître de l’orge de Jean Van Hamme sont tous issus d’une saga familiale qui m’interpellent sans que je n’en sache la raison. J’ai fait d’autres recherches pour Eldorado, surtout portées vers les transmissions implicites et inconscientes. En fait, je crois fermement que, à l’intérieur d’une maison, les enfants comprennent et ressentent toutes choses autour d’eux. Certains détails se transmettent inconsciemment par des réflexes, des postures ou des expressions ; les enfants intègrent des traumatismes ou des automatismes de leurs parents et les transmettent à leur tour, de génération en génération. C’est un patrimoine immatériel qui m’inspire énormément et je suis convaincue qu’il réside une malédiction dans la famille d’Eldorado où chacun se dépêtre d’un traumatisme dont il ignore réellement la source. J’ai notamment fait des recherches sur les études psycho généalogiques et la mémoire traumatique pour me guider dans la construction du roman.

Eldorado est scindé en trois grandes parties, évoquant les trois personnages centraux : Marco, Gina et Ernesto. Quel est le lien entre ces personnages ? Peux-tu nous parler d’eux, comment ils sont nés, quelles ont été tes sources d’inspiration… ?

Au-delà des liens familiaux, les trois personnages sont liés par le désir d’une vie meilleure et de leur eldorado. Pour les créer, j’ai été inspirée par la rencontre d’une dame, Odile d’Amato, mariée à un homme italien, Mario d’Amato. Après la guerre, son époux a dû fuir l’extrême pauvreté de l’Italie pour trouver refuge en France. Les cousins de Mario d’Amato décidèrent ensuite de partir en Amérique du Sud. Ces différents chemins tracés m’ont fortement aidée à créer le personnage de Marco, le premier protagoniste du roman. Il fuit l’Italie pour se rendre au Brésil et rejoindre des amis d’enfance, mû par la peur mais aussi l’espoir. Gina, sa fille, est engagée pour améliorer le monde des années 1970. Elle rejoint les luttes gauchistes et son eldorado se crée progressivement dans ce combat pour l’amélioration du monde. Son fils, Ernesto, est le déraciné de la famille. Il souffre de l’absence d’objectif dans sa vie et, sans savoir de quoi l’avenir sera fait, sa quête personnelle, avant d’atteindre son eldorado, sera d’abord de le trouver.

Dans les premières pages du livre, tu sembles mettre un point d’honneur à évoquer le sentiment de nostalgie de Marco et la description des lieux. Que cherchais-tu à transmettre, dès le départ, au lecteur ?

Je voulais tout d’abord parler d’un ancrage illusoire universel. Les gens sont, je pense, tiraillés entre un désir de nouveauté et un ancrage indélébile dans la société. Cette nostalgie de Marco, envers un monde disparu, est sa raison de vivre parce qu’il souhaite retrouver sa place. Même si ce socle familial reste rassurant, cela peut devenir un obstacle à la recherche d’une amélioration future. 

Le titre Eldorado fait référence à la contrée mythique de l’époque des conquistadors espagnols, connue pour son aspect chimérique. L’objectif de tes personnages ne serait qu’illusion ?

Ce concept est plus versatile qu’illusoire. L’eldorado est un élan vital, une intention qui nous pousse à vivre. Par exemple, certains personnages du roman trouvent leur eldorado dans la construction de leur famille, avoir des enfants et des petits-enfants. Mais, finalement, une fois leur eldorado atteint, ils restent insatisfaits et cette contrariété humaine peut ressembler à une illusion si nous avons en tête qu’un eldorado n’est rien d’autre qu’une ligne d’arrivée qui ne cesse de reculer…

Tu as écrit : « C’est ainsi que (…) nous trouvons un sens dans les gestes que nous accomplissons jour après jour. Grâce à cet endroit magique dont les contours restent flous dans un coin de notre esprit, mais qui, on s’en persuade, existe bel et bien, au moins à l’état de projet ». Est-ce que, pour toi, le terme d’eldorado se rapproche de la notion de « bonheur », avec son lot de fantaisies et d’abstraction ?

L’eldorado peut effectivement ressembler au bonheur, mais également à une frustration qui pourrait progressivement se transformer en motivation. Par exemple, certains personnages sont insatisfaits par l’absence de leur eldorado ; au contraire d’autres personnages acceptent cette tragédie de ne pas réussir et de se contenter de ce qu’ils ont déjà ; comme une sagesse.  

À propos du voyage extérieur, y a-t-il une raison particulière pour avoir choisi des lieux comme l’Italie, le Brésil ou la forêt amazonienne ?

À travers son histoire, Odile d’Amato m’a littéralement transportée et, même si je n’ai pas d’attachement particulier avec ces endroits, elle a réussi à piquer mon intérêt avec ses anecdotes presque romanesques, notamment sur les diasporas portugaises et italiennes. En vivant en Australie, j’ai pu constater que les deux cultures, italiennes et australiennes, fusionnaient parfaitement entre elles. À l’époque, énormément d’européens sont partis en quête de richesse en Australie parce que des territoires étaient à peupler et de l’or attendait d’être trouvé. Malgré tout, même si le mélange est présent, chacun garde encore la culture de son pays d’origine. Ce tiraillement social est assez fascinant.

A contrario, le voyage intérieur est une thématique importante de ton roman. Quels personnages semblent s’y adapter le plus ?

Chez Gina, on découvre un grand changement, physique et psychologique, parce que tous les évènements au cours de ses voyages auront un impact sur ses choix de vie. Bien qu’elle garde ses convictions, elle n’hésite pas à changer de cap, car les évènements extérieurs viennent bouleverser sa vie intérieure…

Pourquoi avoir choisi de commencer le roman par Marco ? 

Marco ne part de rien. Il revient dans son village natal comme une page vierge, comme un nouveau-né qui n’a plus aucune base. À cause des dégâts générés par la guerre, Marco renaît à nouveau afin de tout reconstruire, de A à Z. C’est important de commencer un livre par une page vierge comme ce personnage, malgré l’impact des futures générations qui porteront, en eux, le traumatisme du grand-père. Le roman fait une sorte de boucle parce que Gina et Ernesto doivent se construire en endossant le poids de leur héritage, pour débuter par Marco qui repart de zéro. C’est un cheminement de vie où l’histoire commence par un chamboulement du monde et où tout doit être reconstruit, y compris le monde idéologique. 

Qu’est-ce qui t’a donné envie d’écrire un roman et de le publier ? As-tu des petits rituels d’écriture ? 

Au niveau de mes rituels, je fais souvent des plans de chapitre pour m’y retrouver, imaginer un élément perturbateur, décrire les environs, les odeurs, les sensations. Le plan n’est jamais précis. J’ai juste à me poster devant ma feuille blanche et les idées affluent dans mon esprit. L’écriture me permet d’évoquer des sujets qui me tiennent à cœur et l’intrigue de mes romans est un moyen pour parler de mes débats intérieurs et des problématiques sociétales sur lesquelles je m’interroge. 

Selon toi, est-ce que l’intrigue d’Eldorado peut faire écho à l’actualité (notamment avec la guerre en Ukraine) ? Qu’est-ce qui t’a poussée à traiter d’un thème historique ?

Eldorado fait complètement écho à l’actualité. Tout fait référence à un sentiment d’appartenance. Pourquoi fuir un pays en guerre ? Pourquoi y rester ? Pourquoi blâmer ceux qui s’en vont ? Pourquoi célébrer ceux qui veulent se battre alors que la plupart des conflits ne les concernent pas ? Tous ces thèmes universels comme la transmission, la résilience, le tiraillement ou l’insatisfaction chronique sont des matières sur lesquelles je me penche, notamment pour Eldorado parce que ce livre est le support que j’ai trouvé pour en parler. 

Pourquoi as-tu choisi les Éditions Kaplume pour éditer ton premier roman ?

J’ai effectué des recherches pour trouver cette maison d’édition et les sujets de mon intrigue collaient parfaitement avec la ligne éditoriale que propose Kaplume. Le thème de l’exil, notamment, est un sujet qui m’importe. Comprendre comment le voyage transforme et fait évoluer les gens, au fil des rencontres, est très enrichissant. J’ai adoré le premier contact avec Julie, l’éditrice et fondatrice de Kaplume, et son roman, Racines d’Elles, qui se passe en Birmanie, un endroit qui reste l’un de mes pays phares ! J’ai également été séduite par le fait que la maison soit jeune et qu’il y ait beaucoup de femmes. 

Un petit bonus pour donner envie aux lecteurs de lire ton livre ?

Ce roman, je pense, parlera à tout le monde. L’eldorado est cette petite étincelle qui nous galvanise tous. Chacun peut se reconnaître dans cette histoire, car cet élan est propre à l’humanité. Je crois que le voyage est le moyen le plus sûr de trouver son eldorado 🙂

 

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Merci et bravo à Fanny,

L’équipe Kaplume